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Imprimer le texteLe petit prince qui ne parlait plus
IV - Pas de temps à perdre
La petite fille entraîne le petit Prince tout en haut de la tour Nord, dans sa chambre. Sur le pas de la porte, il l'interroge du regard.
- Tu te demandes comment je connais le chemin qui conduit à ta chambre, n'est-ce pas ? demande Flambinette.
Le petit Prince approuve de la tête.
- Et bien c'est simple : avant de partir j'ai appris par coeur le plan du château, répond-elle avec espièglerie.
Le petit Prince sourit de ce petit stratagème, puis s'approche de la fenêtre et jette un coup d'oeil dans la cours et se retourne vers la petite fille.
- Oui, oui, c'est comme ça aussi que je savais à quelle fenêtre m'adresser tout à l'heure.
Le petit Prince pense alors que décidément les moments qu'il va passer avec cette petite effrontée vont êre très intéressants.
Après avoir fait le tour des appartements du petit Prince, Flambinette s'assoit sur le lit, les jambes croisées, l'air pensif. Le jeune garçon, quant à lui, reste appuyé à la fenêtre et l'observe. Il se demande combien de temps elle va rester sans bouger, car il a déjà remarqué que la tranquillité et la patience ne sont pas les vertus principales de l'enfant.
Du reste la voilà qui saute au bas du lit.
- Bon assez perdu de temps ! Il faut que l'on se mette au travail, s'exclame-t-elle. Trouve-moi du papier et un crayon, comme ça nous pourrons communiquer plus facilement.
Et pendant que le petit Prince s'exécute, elle explique :
- Car tu vois, tu es pour moi un sujet d'étude, une sorte d'examen pour mon diplôme de Fée. Si je réussis, j'aurais quasiment gagné. Tu comprends ?
Le petit Prince fait Oui de la tête.
- Bien. Pour commencer donne moi le jour, l'heure, la minute et la seconde du moment où tu t'es rendu compte que tu ne pouvais plus parler.
Le petit Prince écrit aussitôt sur la feuille :
1er Dimanche du mois de Septembre
Car il est certain que c'est un jour qu'il n'est pas prêt d'oublier.
Pour l'heure aussi il n'hésite pas :
12 h
C'était au moment où son page lui amène son déjeuner.
Par contre pour les minutes et les secondes, il doit bien admettre qu'il n'en sait rien.
Flambinette ne s'en inquiète pas. Elle ouvre la porte de la chambre à tout volées et appelle le page qui cire les chaussures dans le couloir. A la question qu'elle lui pose, le garçon lui répond aussitôt :
- C'est simple Monsieur le petit Prince mange tous les jours à la même heure : 12 h 07 très précise. Les sept minutes, c'est le temps qu'il faut pour monter le plateau des cuisines à sa chambre.
Et Flambinette referme la porte.
- Bien, bien. Nous avons donc le jour, l'heure, la minute. Les secondes, tout compte fait, n'ont pas vraiment d'importance. Maintenant passons aux symptômes. Ouvre la bouche s'il te plaît.
Le petit prince ouvre la bouche.
- Tire la langue. C'est bien ce que je pensais : ensorcellement !
Le petit Prince écrit aussitôt :
Comment tu sais ça ?
- Ben, à la couleur bleu !
Tu la vois ?
- Biensûr, quelle question !
Mais les médecins n'ont rien vu, eux !
- Tu sembles oubliée que tu as devant toi une presque fée, gros bêta. Ce genre de chose ne peut nous échapper, à nous les fées.
Après un petit temps de réflexion, Flambinette ajoute :
- Il faut maintenant que tu te rappelles tout ce que tu as fait ce jour-là. Et si ça ne va pas, ce que tu as fait le jour d'avant, et ainsi de suite, jusqu'à ce qu'on ait trouvé. Au travail.
Et pendant des heures, les deux enfants retracent l'emploi du temps du petit Prince sur une période de trois jours. Tout y passe méticuleusement, du levé au couché, sans même oublier les pauses WC.
Et soudain l'apprentie Fée s'exclame :
- ç a y est. J'ai trouvé.
Texte : 1998 © M.-H. Lafond